Lutter contre la pandémie et sauver le journalisme, c’est maintenant ou jamais

2020 et la pandémie de Covid-19 ont eu un impact brutal sur le journalisme: fermetures de médias, licenciements, pertes de revenus et insécurité de l'emploi ont fait la Une de nos communications. Cependant, il y a également eu des initiatives et des tendances positives, des «pousses vertes» qui pourraient se transformer en solutions efficaces à la crise déclenchée dans les médias. La FIJ et ses affiliés du monde entier sont déterminés à lutter pour un tel avenir pour notre profession.

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La pandémie a déclenché parmi les syndicats, les travailleurs des médias et les organisations de la société civile une vague de solidarité sans précédent dans l'histoire récente. Si l'unité et la solidarité sont essentielles pour étendre et garantir les droits des travailleurs, la pandémie a prouvé qu'ils servent également de refuge en temps de crise. 

La liste des initiatives de solidarité régionales et locales des syndicats de journalistes et des organisations de la société civile en 2020 est interminable, et comprend notamment des actions menées par des syndicats ayant des ressources limitées. Au Kenya, par exemple, l'Union des journalistes du Kenya (KUJ) a lancé une campagne inspirante  créant un fonds destiné à être utilisé pour acheter de la nourriture et d'autres produits essentiels pour les journalistes dans le besoin touchés par la pandémie. Une campagne similaire a eu lieu au Salvador, où l'APES a été très active et a réussi à obtenir des dons de nourriture, de biens essentiels et d'équipements de protection pour les collègues qui se trouvaient dans une situation vulnérable.

«Pour moi, l’exemple du Kenya était une des actions les plus positives du continent parce que c'était une grande manifestation de solidarité. Nous devons continuer à rendre compte sans crainte et à mener une lutte constante contre la désinformation", a déclaré Louis Thomasi, directeur régional de la FIJ en Afrique.

«Cette année a révélé que le travail et le rôle des organisations syndicales sont essentiels dans des contextes comme celui dans lequel nous vivons. Mais elle a également montré que les organisations devront assumer leurs propres transformations afin de répondre aux besoins et aux demandes naissant de la crise de cette année», a commenté Paula Cejas, directrice régionale de la FIJ pour l'Amérique latine.

Les syndicats ont été particulièrement actifs dans les pays dont l'État ne parvenait pas à apporter des réponses rapides et efficaces à la pandémie. Dans certains cas, comme pour l'Asociación Nacional de Periodistas (ANP) au Pérou par exemple, son activité était si répandue et si visible qu'elle a en fait entraîné une augmentation du nombre de membres. Aux Maldives, nous avons également assisté à la renaissance de la Maldives Journalist Association (Association des journalistes des Maldives) tandis que les journalistes namibiens ont lancé le Namibia Media Professionals Union (Syndicat des professionnels des médias de Namibie) (NAMPU).

L'activité des syndicats comprenait des actions clés telles que l'offre de formations gratuites hors ligne et en ligne sur la couverture du Covid-19, la fourniture de matériel de sécurité gratuit ou l'offre de conseils aux freelances. De plus, alors que les gouvernements autoritaires utilisaient la pandémie pour  restreindre la liberté des médias, nos affiliés ont riposté afin de garantir aux travailleurs des médias porteurs d'une carte de presse de la FIJ la liberté de mouvement pendant les confinements, comme cela s'est produit aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. 2021 devrait permettre d’ajouter plus de pays à cette liste.

«Voir les syndicats organiser des webinaires et des réunions en ligne était inspirant. Cela signifiait non seulement des économies de coûts, ce qui est extrêmement important, mais aussi une autre ouverture des possibilités pour la démocratie et la représentation syndicales», a déclaré la directrice régionale Asie-Pacifique de la FIJ, Jane Worthington, qui a assisté à une numérisation rapide des activités des affiliés régionaux de la FIJ pendant la pandémie.


Enfin, 2020 a également été témoin d'une présence plus forte des syndicats dans les médias numériques. La pandémie n’a pas arrêté la vague continue de syndicalisation dans les médias numériques, en particulier aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et en Australie. 2021 devrait être l'année permettant de consolider cette tendance et de l'étendre à travers le monde. Les employeurs des médias numériques nous ont dit que le travail précaire dans les médias numériques était inévitable, mais ce n’est pas le cas.

Plans publics de relance pour les médias

Les syndicats étaient à l'avant-garde de la lutte pour amener les gouvernements à soutenir les emplois et à protéger les médias face à l'impact de la pandémie. La FIJ a salué les plans de relance public et de soutien économique pour les médias et les travailleurs indépendants annoncés par certains gouvernements au cours de l'année et a réitéré la nécessité de prendre de nouvelles mesures jusqu'à la fin de la pandémie.

La plupart de ces mesures de soutien étaient concentrées en Europe, tandis que les travailleurs des médias d'autres régions du monde se sont trop souvent retrouvés sans aucune forme de soutien ou de protection, ce qui les a poussé vers des situations économiques de plus en plus fragiles ou les a forcé à quitter la profession, en particulier dans les médias locaux. Si nous ne réagissons pas, des déserts de l’information apparaîtront inévitablement, mettant gravement en danger la liberté de la presse et le droit d’être informé.

À cet égard, les affiliés de la FIJ, des Etats-Unis à l'Indonésie, ont appelé à plusieurs reprises les autorités à fournir des fonds publics pour soutenir les opérations d'information. Ces efforts ont été fructueux dans de nombreux pays. Par exemple, le travail et le lobbying du SNPM et du Conseil national de la presse au Maroc ont permis de mettre en place un dispositif financier public pour soutenir les organisations de médias, sauver des emplois et garantir les revenus des journalistes.

Il est important que les gouvernements considèrent les travailleurs des médias comme des travailleurs essentiels pendant la pandémie et prennent des mesures audacieuses pour sauver des emplois dans l’industrie des médias. Sinon, les systèmes démocratiques seront en danger.

La lutte contre les fake news

Cette année a également mis en évidence l'importance d'accéder à des informations fiables et impartiales en temps de crise. Les journalistes ont travaillé dur pendant la pandémie pour exposer de fausses nouvelles qui mettent la santé des gens en danger, comme lorsque Donald Trump a suggéré que le virus pourrait être traité en injectant un désinfectant dans le corps.

Mais la diffusion de fausses nouvelles va au-delà du président américain sortant, et les affiliés de la FIJ ont dû s'y attaquer partout dans le monde. Le Syndicat des journalistes palestiniens (PJS) a lancé sa plateforme de vérification des faits sur la couverture médiatique du Covid-19, et ce n’est qu’une des nombreuses initiatives syndicales. Cela a été essentiel pour améliorer la confiance du public dans les médias et a contribué à réduire les sanctions officielles contre les médias pour la publication d'informations mal recoupées ou inexactes en montrant que les médias, dans le cadre adéquat, peuvent corriger leurs propres erreurs sans recourir à des sanctions juridiques.

 «En 2021, nous devons continuer à renforcer la confiance dans les médias en soutenant un journalisme libre et indépendant, en promouvant des structures d'autorégulation pour renforcer la responsabilité des médias», a déclaré Monir Zaarour, directeur des politiques et des programmes pour le Moyen-Orient de la FIJ.

Les défis qui nous attendent

Taxer les grands groupes technologiques et faire payer Facebook et Google pour l'utilisation du contenu médiatique sera essentiel pour assurer l'avenir du journalisme en 2021. Mais ce n'est pas tout. Transformer le rôle des syndicats et consolider la vague de syndicalisation dans les médias numériques, faire pression pour des plans de soutien aux médias, façonner l'impact du télétravail dans le journalisme et assurer la sécurité des travailleurs des médias sont également des domaines où, malgré les avancées positives de ces dernières années, il reste encore beaucoup à faire.

L'année prochaine, les syndicats devront également continuer à lutter contre les inégalités entre les genres, qui, selon une enquête de la FIJ, se sont accrues pendant la pandémie. Les personnes qui ont participé à l’enquête ont exhorté les employeurs et les gouvernements à mieux réglementer et organiser le télétravail afin de limiter un stress intense et de lutter contre les inégalités persistantes.

Les défis qui nous attendent sont énormes et il n’y a qu’une seule façon de les relever tous: dans l’unité et la solidarité. Les syndicats doivent travailler ensemble pour trouver des solutions justes qui garantissent que le coût de cette crise ne retombe pas sur le dos des travailleurs, comme cela s’est produit lors de la crise économique précédente. C’est maintenant ou jamais.

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