Bon anniversaire Julian Assange !

Tu as 52 ans ce 3 juillet 2023, dont près de quatorze ans privés de liberté ! Quels crimes as-tu commis ?

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[Translate to French:] Supporters of WikiLeaks founder Julian Assange take part in a 'Night Carnival for Assange' march in London on February 11, 2023. A UK court on issued on April 20, 2022 a formal order to extradite the WikiLeaks founder to face trial in the United States over the publication of secret files relating to the Iraq and Afghanistan wars. (Photo by Susannah Ireland / AFP)

Celui de créer en 2006 Wikileaks pour permettre au plus grand nombre d'avoir accès gratuitement à une masse d'informations ?

Celui de remplir ta mission de journaliste en révélant des crimes de guerre de l’armée américaine en Iraq et Afghanistan ?

Celui de mettre en danger les États Unis d’Amérique en révélant les crimes cachés ?

Les trois, aux yeux de l’administration américaine et de ses indéfectibles alliés britanniques.

Qui es-tu Julian Assange ?

Un informaticien et cyber militant, considéré par certains comme un lanceur d’alerte, en réalité un journaliste australien comme en témoignent la carte de ton syndicat et celle de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) qui représente quelques 600 000 journalistes.

Tu es emprisonné, depuis quatre ans, comme un terroriste dans une prison de haute sécurité près de Londres,sans qu’aune incrimination n’ait été portée à ton encontre.

Tu es détenu à Belmarsh par les autorités britanniques qui veulent être sûres de pouvoir te livrer à leurs alliés américains aussi vite que possible.

Un "Homme de l’année" devenu un paria. 

En 2010, Julian Assange a révélé au monde entier, grâce à un célèbre transfuge de l’armée américaine Chelsea Manning, plus de 150 000 documents internes classifiés américains. On se souvient de la vidéo montrant la fusillade mortelle d’un hélicoptère US contre des civils, dont des journalistes à Bagdad. 

Le Monde est un des cinq grands journaux occidentaux - avec The New York Times, The Guardian, El Pais et Der Spiegel - à s'être associé à WikiLeaks pour la publication des mémos de la diplomatie américaine.

Les journalistes et médias du monde entier ont relayé ces informations.

Julian Assange, tu étais alors un héros, considéré comme homme de l’année par les lecteurs du site du Time en 2010 et consacré «Homme de l’année » par Le Monde

De héros à paria !

Puis la machine a décrédibiliser, salir et abattre les « ennemis » de l’administration américaine s’est mise en marche avec un certain succès puis qu’encore aujourd’hui on évoque à ton sujet «des zones d’ombre » alors que des investigations sérieuses ont démonté les mécanismes de ces manœuvres de basse police.

On a américanisé le débat en France !

Tu as été diabolisé !

Tu es devenu un paria !

Même si selon le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, le Royaume-Uni et les États-Unis se sont concertés pour détruire publiquement le fondateur de WikiLeaks – et dissuader les autres de dénoncer leurs crimes.* 

Même siNils Melzer, ce Rapporteur, a décrit ta situation comme celle d’un prisonnier politique soumis à des tortures et à des conditions de détention inhumaines et dégradantes.

Tu es, de plus, victime, selon lui, du «non-respect des procédures légales de base. »

Même si, partout dans le monde, depuis des années, des manifestations et prises de positions de nombreux parlements, d’hommes et de femmes politiques, des écrivains, universitaires, artistes majeurs se sont élevées pour dénoncer ta situation et exiger ta libération.

Même si les journalistes, via leurs syndicats, fédérations et associations, ont dénoncé le danger d’attaquer leurs sources et le journalisme d’investigation.

Même si Le Monde et les mêmes autres médias internationaux, dans une lettre ouverte en novembre 2022, sous le titre « Publishing is not a crime » en écho à Journalisme n’est pas un crime, ont demandé ta libération en rappelant qu’à ce jour « les journalistes et les historiens continuent de publier de nouvelles révélations en utilisant le trésor unique de ces documents. »

Ils ont surtout mis en garde contre l’utilisation contre toi de poursuites pour espionnage, car : «Cette inculpation crée un dangereux précédent et menace de saper le premier amendement américain et la liberté de la presse. »

Si nous n’élevons pas nos voix pour résister partout où nous le pouvons, une injustice monstrueuse à l’égard d’un individu se dessine, il risque 175 ans de prison, ainsi qu’un coup sévère porté à la liberté de la presse. 

En effet, si un journaliste australien, ayant publié en Europe, devait être traduit devant une Cour interne américaine, en vertu d’une loi interne américaine, qui, en ce monde, oserait ensuite déplaire publiquement à l’administration US ?

Julian, tu dois être libéré, réhabilité, réinvesti de tes droits et rendu à ta femme et tes deux enfants.

 

Dominique Pradalié

Journaliste

Présidente

Fédération internationale des journalistes

 

*lettre ouverte https://amp.theguardian.com/gnm-press-office/2022/nov/28/an-open-letter-from-editors-and-publishers-publishing-is-not-a-crime

**The Trial of Julian Assange[Le procès de Julian Assange, verso books 2022.