Cameroun : un journaliste de RFI condamné à 10 ans de prison

© RFI/AFP photo: Ahmed Abba dans les rues de Maroua, dans l’Extrême-Nord du Cameroun

La Fédération Internationale des Journalistes (FIJ), première organisation mondiale de journalistes (600.000 membres), a interpellé le gouvernement du Cameroun mardi 25 avril à propos de la lourde peine de 10 ans d’emprisonnement et de l’amende de 56 millions de francs CFA (85000 euro) infligées  au correspondant de RFI en langue haoussa par le tribunal militaire de Yaoundé le 24 avril. Ses avocats clament son innocence et entendent faire appel du jugement.
A la suite d’une longue procédure et plaidoirie lundi 24 avril le journaliste camerounais Ahmed Abba a été condamné à 10 ans de prison ferme et une lourde amende de près de 56 millions de francs CFA (environ 85 000 euros). 
Ahmed Abba avait été arrêté en juillet 2015 à Maroua, dans l'Extrême-Nord du Cameroun, puis détenu en secret et torturé. 
Le journaliste est privé de liberté depuis le 30 juillet 2015 pour avoir couvert et diffusé sur RFI des actes terroristes perpétrés dans le nord du Cameroun par le groupe Boko Haram. 
Il a été inculpé pour non dénonciation d'acte terroriste, apologie du terrorisme et blanchiment d’argent. Des chefs d'accusation pour lesquels il plaide non coupable, en maintenant qu’en couvrant des faits de terrorisme, il n'a fait que son travail de journaliste. 
Ahmed Abba a dû attendre quatre mois pour enfin pouvoir parler à son avocat et n’a pas été autorisé à s’exprimer publiquement. Il comparaissait devant le tribunal militaire de Yaoundé vendredi 24 mars 2017 pour la 15ème fois, et a pu pour la première fois s’exprimer  sur le fond de son procès. La peine de mort a été requise contre lui. 
Selon la direction de RFI, les productions d'Ahmed Abba diffusées sur son antenne en langue haoussa constituent un travail journalistique incontestable qui ne laisse pas de place à la moindre suspicion de sympathie pour un mouvement terroriste. 
« Les sanctions infligées à Ahmed Abba sont significatives des limites apportées à la liberté de la presse au Cameroun », a déclaré Philippe Leruth, le président de la FIJ. « Tout pays démocratique se doit d’être doté d’une justice indépendante. Nous sommes très inquiets du sort qu’elle réserve à notre confère Ahmed Abba et exigeons sa libération immédiate. La criminalisation du journalisme est tout à fait intolérable. » Selon Denis Nkwebo, président du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) affilié de la FIJ qui a réagi à cette condamnation sur RFI.  « C'est une punition contre la presse, c'est une volonté de criminaliser le métier de journaliste au Cameroun. Tout ce qu'on reproche à Ahmed Abba, c'est d'avoir été en situation professionnelle. A aucun moment dans ce procès, on ne nous a donné la preuve qu'il a été impliqué dans quelque chose de grave. La presse était jusqu'ici sous le coup d'une oppression silencieuse, et la condamnation d'Ahmed Abba est un message fort à l'endroit des journalistes qui osent encore exercer ce métier dans un pays où l'on nous affirme tous les jours que l'on est en démocratie. »  Nkwebo  rappelle que d'autres journalistes sont poursuivis pour non-dénonciation d’acte terroriste. Selon lui, au moins six journalistes anglophones ont été interpellés et sont détenus dans le cadre de la crise au Cameroun anglophone.

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