END IMPUNITY CAMPAIGN 2018 : rapport sur la RDC

Les agressions contre la presse se sont multipliées en République Démocratique du Congo (RDC) ces dernières années, notamment depuis la crise politique de 2016. L’escalade des atteintes à la liberté d’expression dans le pays sont nombreuses et les journalistes, en situation d’insécurité permanente, sont les cibles de violences diverses très rarement réprimées.  

Une profonde crise politique et sécuritaire affecte directement la liberté de la presse en RDC. D'après nos données, depuis 2000, au moins 17 journalistes ont été tué en RDC soit en moyenne un journaliste assassiné chaque année. Les journalistes congolais et étrangers sont constamment brimés, menacés, terrorisés par le pouvoir et sont les cibles de violences. Ils ne peuvent exercer normalement leur travail puisque toute protestation ou critique du pouvoir génère irrémédiablement menaces et agressions.

Les journaux et radios locales qui osent donner la parole aux voix dissidentes sont régulièrement suspendues, pillées et saccagées. Certains journalistes sont tabassés en pleine rue, devant leur domicile, pour un rappel à l’ordre. Les kidnappings se multiplient également à l’approche des élections de décembre, notamment dans les régions de l’Est du pays à la frontière avec le Burundi et le Rwanda, le Sud Kivu et le Nord Kivu, les deux régions les plus dangereuses pour les journalistes en RDC.

En septembre 2018, le journaliste Hassan Murhabazi, travaillant pour la radio locale Svein, a été enlevé deux jours durant et retrouvé dans un état très faible à 30 kilomètres au nord de son lieu d’enlèvement, après avoir été tabassé. La veille de son kidnapping, le journaliste aurait reçu plusieurs menaces par sms, l’enjoignant notamment à cesser de parler d’Emmanuel Ramazani Shadary, candidat de la majorité à la Présidentielle de décembre.

Depuis 2006, année qui marque le début du mandat du président Joseph Kabila toujours au pouvoir depuis, au moins 11 journalistes ont été assassinés sans que jamais leurs meurtriers ni les commanditaires des assassinats ne soient traduits en justice. Six ont perdu la vie depuis 2013. Le dernier d’entre eux a été tué en 2017. Aucune enquête n’est menée sur ces meurtres ni sur les menaces, violences physiques, enlèvements, arrestations et détentions que subissent les journalistes.

L’accès à l'information est également réduit au minimum dans le pays. Internet est constamment suspendu et les réseaux sociaux bloqués.

Les correspondants étrangers sont aussi les cibles du pouvoir, surveillés et brimés s’ils ne respectent pas des règles arbitraires et restrictives. Le 12 juillet 2017  le ministre de la Communication et Médias, Lambert Mende, publiait ainsi un arrêté précisant qu’il est strictement interdit aux correspondants de la presse étrangère de réaliser des reportages dans les lieux stratégiques tels que « les casernes militaires, installations de télécommunications, ambassades, sauf autorisation expresse des responsables desdits lieux». Le texte assortit les déplacements des journalistes en dehors de la capitale Kinshasa d’une autorisation préalable du ministre de tutelle « après concertations avec les autorités locales des entités à visiter ». Cette mesure, depuis toujours en place, viole les conventions internationales couvrant le droit à la liberté d’expression.

En 2018, le signal de RFI à Kinshasa était brouillé pendant 9 mois. Une série d’agressions a été menée en été 2017 : en juillet  deux journalistes de l’Agence France-Presse (AFP) qui effectuaient un reportage dans un hôpital de Kinshasa ont été arrêtés et brutalisés par des militaires. Au printemps de la même année, trois journalistes de TV5 à Kinshasa ont été tabassés et leur matériel de travail avait été saisi.

Lors de la couverture des manifestations de contestation du chef de l’Etat ces deux dernières années, les journalistes congolais ont systématiquement été pris pour cible par les services de sécurité, qui jouissent d’une impunité totale.  En février 2018, cinq journalistes qui couvraient une manifestation menée par les élèves de ces deux écoles, ont été violemment molestés à Goma, chef-lieu du Nord-Kivu.

A l’approche des élections présidentielles qui se tiendront le 23 décembre 2018, le contexte politique en République Démocratique du Congo se tend et  la situation déjà critique pour les journalistes s’empire. Fin octobre 2018, la journaliste Sylvanie Kiaku, travaillant pour l’hebdomadaire La Percée, a été détenue plus de 9 jours en prison, poursuivie pour diffamation après la publication de deux articles portant sur la Banque Commerciale du Congo selon l’AFP.

Le vendredi 19 octobre, ce sont 5 journalistes travaillant pour Africanews (Octave Mukendi, Bruce Landu, Roddy Bosakwa, Dan Luyila et Laurent Omba) qui ont été “enlevés” par des policiers pendant le bouclage de la publication de l’édition du week-end , toujours selon l’AFP.  Ils ont été libérés 12 heures après leur interpellation et sont depuis surveillés de près. Cette arrestation est intervenue une semaine après la publication d’une série d’articles d’Africanews sur les services de police de RDC. Dans ce climat d’insécurité et à un mois et demi des élections, il est temps que la protection des journalistes soit assurée.

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