Darline Cothière : «La MDJ a accueilli et accompagné 384 journalistes venus de 70 pays»

À l’occasion d’une visite au bureau de la FIJ à Bruxelles, nous avons interrogé Darline Cothière, directrice de La Maison des journalistes (MDJ) à Paris. Elle nous parle de cette structure associative unique au monde, refuge porteur d’espoirs pour les journalistes exilés qui arrivent dans la capitale française.

Qu’est ce que la Maison des Journalistes?

Darline Cothière : « La Maison des Journalistes est une structure associative créée en 2002. Elle héberge et accompagne des professionnels des médias exilés politiques venant du monde entier dans notre résidence de 14 chambres, située à Paris (15ème). Depuis 2002, la MDJ a déjà accueilli et accompagné 384 journalistes venus de 70 pays différents. Nous les accompagnons à chaque étape de leur parcours d’exil, notamment dans les démarches administratives afin de demander le statut de réfugié politique, dans la recherche d’un logement perrin mais aussi dans les demandes d’aides sociales. Nous les aidons également dans leur parcours d’insertion en les guidant vers d’autres associations, en assurant des cours de français et en facilitant la rencontre avec des confrères journalistes français et anciens résidents. De plus, la Maison des Journalistes a aussi son propre média. Nos journalistes ont la possibilité de continuer à exercer leur métier ici et d’avoir une visibilité car nous leur donnons les moyens de s’exprimer librement via le journal en ligne l’Oeil de la maison des journalistes. Les résidents et ex-résidents de la MDJ s’y expriment et d’autres plumes occasionnelles collaborent également au journal. Ils y parlent de liberté d’informer, d’idéaux démocratiques, d’évolution des médias, du droit de la presse et des journalistes, de liberté d’expression.»

Quelles autres actions menez-vous à la MDJ?

Darline Cothière : «Notre action quotidienne en tant qu’association ne s’arrête pas au pôle social car nous avons d’autres objectifs. Nous menons notamment des actions de sensibilisation au respect de la liberté de la presse et de la liberté d’expression à travers différents programmes. Par exemple depuis 2006 nous avons mis en place l’opération Renvoyé Spécial menée conjointement avec le CLEMI (Ministère de l’Education Nationale). Dans ce projet pédagogique, les journalistes exilés vont à la rencontre de jeunes lycéens partout en France pour parler de leur expérience, de leur parcours d’exil et sensibilisent les élèves à la cause de la liberté de la presse et de la défense des démocraties. Chaque année, nous intervenons dans plus de 60 établissements et, depuis les attentats de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015, nous intervenons désormais auprès de jeunes sous protection judiciaire, en partenariat avec le Ministère de la Justice et de la Culture. Un autre programme existe à l'échelle européenne, une sorte de déclinaison de Renvoyé Spécial, intitulé Press 19 et impliquant des professeurs d’université. Dans ce programme, les journalistes exilés interviennent dans des universités européennes. Nous organisons également d’autres rencontres et événements pour sensibiliser et éveiller les consciences sur la liberté de la presse : des actions communes impliquant, par exemple, l’UNESCO pour la journée mondiale de la radio, et, tout au long de l’année, des expositions, des projections ou des conférences-débat. »

Quels sont les défis ou difficultés auxquels la MDJ doit faire face au quotidien?

Darline Cothière : « Le premier de tous les défis pour une association, c’est la question financière. La MDJ fonctionne en grande partie grâce aux contributions financières d’une quinzaine de médias qui sont des parrains de l’association, des dons et une subvention européenne, le Fonds Asile Migration Intégration (FAMI), via le Ministère de l’Intérieur. Mais rien n’est jamais acquis. En effet, il faut fidéliser les contributeurs et aller à la recherche de nouveaux soutiens en permanence. De plus, il faut s’adapter aux nouvelles lois et directives de la France sur l’accueil et l’immigration. L’autre défi qu’on ne perçoit pas toujours, c’est le travail interne de pédagogie qui nous incombe. Certains journalistes nouvellement arrivés ont une idée fausse, fantasmée de la France comparée à la réalité du pays. On doit être à l’écoute car les résidents arrivent avec leurs fragilités, leurs frustrations et attentes. De plus, on doit s’assurer de la cohésion du groupe : si les journalistes exilés ont vécus plus ou moins les mêmes difficultés, un parcours d’exil similaire, chacun a ses spécificités culturelles par exemple.»

Qu’espérez vous après cette rencontre avec la FIJ?

Darline Cothière : «Avec la FIJ nous avons beaucoup de projets à conduire ensemble. Une collaboration durable est possible, nous la souhaitons vivement.Grâce à son grand réseau de syndicats, nous pourrions par exemple exporter le projet presse 19 ici en Belgique et partout en Europe. Surtout, nous pourrions chaque année développer des projets communs sur les thématiques de la liberté de la presse et d’expression, des principes communs qui nous sont chers. »

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Propos recueillis par Marie Pouzadoux

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