Égalité salariale : « Les femmes ont été affectées de manière disproportionnée dans cette crise », Michelle Stanistreet

Ces dernières années, le National Union of Journalists (NUJ) a été très actif dans la lutte contre les inégalités salariales au travail, plus particulièrement au sein de la BBC, le service public de l'audiovisuel britannique. Nous avons interrogé la Secrétaire générale du NUJ, Michelle Stanistreet, sur le rôle joué par son syndicat pour soutenir les femmes dans leur demande d’égalité salariale. Nous lui avons aussi demandé des conseils afin d’aider d’autres personnes à corriger l’écart salarial entres hommes et femmes.

[Translate to French:] Credit: Jason Harris

1. La victoire de Samira Ahmed contre la BBC l’année dernière constitue un cas de jurisprudence remarquable dans la lutte pour l’égalité salariale dans les médias. La plaignante avait affirmé qu’elle était payée 6 fois moins que l'un de ses collègues masculins pour effectuer le même travail. Votre syndicat était un soutien emblématique pour Samira. Quels conseils donneriez‑vous aux syndicats souhaitant soutenir des plaintes portant sur des questions d'inégalité salariale ?     

Le NUJ a financé la plainte de Samira, ainsi que les procès pour inégalité salariale de nombreux membres occupant différents postes au sein de la BBC. En 2017, la BBC a été contrainte de divulguer les noms de ses salariés à haut revenu, ce qui a déclenché la question des inégalités salariales. Depuis, le NUJ a consacré la majeure partie de ses activités syndicales et de sa représentation légale à s’attaquer au fléau des inégalités salariales. L’égalité et l’équité sont au cœur des préoccupations syndicales. Il est essentiel de lutter pour s’assurer que ces valeurs persistent, qu’il s’agisse de garantir les salaires ou de combler l’écart salarial entre hommes et femmes. Les campagnes proactives qui se concentrent sur des problèmes importants que rencontrent les femmes permettent d’affirmer l’engagement et l’activisme. 

2. Dans cette affaire, il a été surprenant de voir que la BBC n'a pas fait appel de la décision du Tribunal du travail. Cette décision donne‑t‑elle de l’espoir à davantage de femmes journalistes de demander l’égalité salariale au travail ? 

Selon moi, la BBC avait déjà perdu, avant même que le jugement ne soit rendu. Leur stratégie de défense montrait leur volonté de dépenser des sommes considérables dans une équipe juridique de qualité et ils étaient prêts à dénigrer et discréditer Samira lors du procès. Cette stratégie était insensée et a sûrement eu un effet contre‑productif au sein de l’opinion publique. Notre victoire évidente et décisive n’a pas laissé à la BBC l’opportunité d’étouffer l’affaire. Il aurait été imprudent pour la BBC de dépenser davantage d’argent provenant des redevances, ce que le NUJ aurait condamné fermement. Toute décision d’égalité salariale sur un lieu de travail, tout procès, est un message pour les autres femmes partout dans le monde : elles doivent s’assurer qu’elles sont traitées avec impartialité. Dans le cas contraire, elles doivent absolument lutter contre cette injustice et la remettre en cause. 

3. Comment les syndicats peuvent‑ils s’assurer que les rédactions abordent toujours le problème des inégalités salariales, alors que les médias luttent pour survivre, suppriment des emplois et réduisent des salaires ? 

Il est parfois facile de réduire les questions d’égalité aux choses  « sympas à avoir », et donc accessoires, dans une rédaction. L’attention se tourne ainsi sur la sauvegarde des emplois et des niveaux de salaire. Toutefois, cet état d’esprit est dangereux. En réalité, pendant les périodes difficiles, il est d’autant plus crucial de maintenir les principes d’égalité et de repousser toute mesure qui renforce les discriminations sur le lieu de travail. Il est évident que les femmes ont été affectées de manière disproportionnée dans cette crise. De nombreux employeurs ont saisi l’opportunité de restructurer l’emploi et de supprimer des postes, sans respecter leurs obligations, comme celle de l’égalité dans l’évaluation des risques. De plus, les femmes et les travailleurs à temps partiels ont été injustement ciblés. Les campagnes actives des syndicats sont des soutiens nécessaires pour lutter contre ces pratiques injustifiables.  

4. En raison de la COVID‑19, l’application de la réglementation sur l’égalité salariale a été suspendue. Les entreprises du Royaume-Uni ont 6 mois de sursis (jusqu’au mois d'octobre) avant toute exécution de la réglementation. Quels outils peuvent‑être utilisés pour continuer à lutter pour l’égalité salariale ?*

Nous encourageons les représentants du NUJ à maintenir le dialogue avec les employés, à la fois pour les inciter à publier le plus rapidement possible leur écart salarial, mais aussi pour collaborer avec les membres sur des plans d’action nécessaires afin de combler ces écarts. Nous essayons également d’étendre la réglementation pour que les données incluent les travailleurs handicapés, ainsi que le personnel noir et issu de minorités ethniques. Pour ne pas perdre en dynamisme, nous avons mené des campagnes contre toute autre suspension du gouvernement du Royaume‑Uni. Nous ferons tout notre possible pour nous assurer que la période de sursis de 6 mois ne mette pas en péril ce travail important. 

 

* La réglementation sur la rémunération des femmes et des hommes exige que tous les employeurs du Royaume-Uni communiquent leurs informations sur l'écart de rémunération entre les sexes par l'intermédiaire du service britannique sur l'écart de rémunération entre les sexes. En raison de l'impact de la pandémie, la Commission pour l'égalité et les droits de l'homme (EHRC) a annoncé que tous les employeurs au Pays de Galles, en Angleterre et en Écosse disposeront d'une période supplémentaire de six mois, qui se termine le 5 octobre 2021, pour communiquer leurs données.

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