Russie : la nouvelle législation sur les fake news met en danger la liberté d'expression

La Fédération Internationale des Journalistes a pris connaissance avec inquiétude de la nouvelle loi russe sur les « fake news » et sur le « manque de respect à l’égard de l’État, des autorités, et de la société », entrée en vigueur le 18 mars dernier.

Manifestations en faveur de la liberté du net, Moscou, mars 2019. Alexander Nemenov / AFP

Aux termes de cette loi, le manque de respect « flagrant » pour « l’État, les autorités publiques, les symboles officiels et la société », peut valoir à ses auteurs une amende jusqu’à 300 000 roubles (quelque 4 600 dollars US) et une peinde prison de quinze jours au maximum. La diffusion de « fake news », elle, peut donner lieu à des amendes jusqu’à 1,5 million de roubles. Il appartient à Roskomnadzor, l’agence gouvernementale chargée de la surveillance des contenus en ligne et des médias, d’intervenir pour bloquer l’accès aux pages qui affichent des contenus qu’elle incrimine, s’ils ne sont pas immédiatement effacés.

Grâce à  l’intervention de la RUJ, l’Union des journalistes de Russie, cette loi a été amendée : elle donne aux médias visés un délai court pour faire valoir leurs arguments de défense.

Cette loi pose néanmoins « un grave problème pour la société. De nombreux responsables ne manqueront pas une opportunité d’utiliser ces lois pour faire pression sur le secteur des médias dans leurs régions. Il y aura une vague de déclarations au bureau du procureur général, des déconnexions ordonnées par Roskomnadzor et des plaintes aux tribunaux. La presse écrira moins sur les problèmes de société et sur les problèmes d’appareil d’État par crainte d’enfreindre la loi. Le principal problème de ces textes est l’absence de critères stricts selon lesquels un matériau peut être reconnu comme faux ou insultant pour les autorités », explique Denis Tokarsky, secrétaire de l’Union des journalistes de Russie.

« L’Union des journalistes de Russie estime que certaines dispositions des lois adoptées ne sont pas suffisamment réfléchies, et confirme son attachement à la défense du droit des citoyens à la liberté d’expression et à la liberté de diffusion des informations dans toutes les situations controversées. J’ai personnellement été contre l’adoption de cette loi non seulement en tant que président de l’Union, mais également en tant que membre du Conseil des droits de l’homme en Russie. Pour le moment, nous avons réussi à atténuer les dispositions particulièrement sévères de la loi, mais cela ne suffit pas », déclare Vladimir Solovyev, président de l’Union des journalistes de Russie.

« La notion même de respect de l’État, des autorités, et de la société paraît difficilement compatible avec la liberté d’expression, déjà encadrée par la déontologie professionnelle et des dispositions légales comme la répression de la diffamation, le respect de la vie privée. Et celle de moralité publique, qui doit permettre aux autorités d’estimer s’il y a lieu ou non d’engager des poursuites est à la fois vague (qui détermine ce qu’est la moralité publique?) et évolutive » commente Philippe Leruth, le président de la FIJ.

La Fédération Internationale des Journalistes presse instamment les autorités russes d’abolir cette législation, ou tout au moins de la réviser, en concertation avec son syndicat-membre russe, l’Union des journalistes de Russie (RUJ).

For more information, please contact IFJ on +32 2 235 22 16

The IFJ represents more than 600,000 journalists in 146 countries

Follow the IFJ on TwitterFacebook and Instagram

Subscribe to IFJ News