Un Verrou Stratégique, un Bastion Politique

Véritable plate-forme militaire et terrain idéal pour l’entraînement en conditions difficiles, il a toujours abrité une base militaire française (elle gravite autour de trois mille hommes), la plus importante en Afrique post-coloniale. Et à chaque crise internationale majeure, il attire une armada de forces armées. Ainsi lors de l’intervention américaine en Somalie de 1993, de celle française au Rwanda de 1994, ou lors des deux Guerres du Golfe. Il accueille depuis les événements du 11 septembre 2001 les forces occidentales coalisées chargées de la lute anti-terroriste dans la région troublée de la Corne d’Afrique et de la Mer Rouge. Soldats américains (entre 1300 et 1500 soldats), allemands (quelque neuf cents hommes), espagnols (autour de 200 soldats) s’y retrouvent aux côtés des Français déjà présents pour une surveillance active et tous azimuts de tous les pays de la Corne. Ce dispositif est placé sous commandement américain dont le Quartier général est installé à Djibouti-ville dans un ancien camp français de la zone aéroportuaire.

Malheureusement, cet intérêt stratégique masque une réalité peu reluisante à Djibouti où les yeux des puissances présentes ne semblent vouloir voir ni la misère sociale ni le lourd déficit démocratique. Dirigé par le même parti depuis l’indépendance de 1977, le Rassemblement populaire pour le progrès (RPP), le pays est livré à la merci d’un homme, Monsieur Ismael Omar Guelleh, et de son régime. En dépit d’un port prospère qui accueille la quasi-totalité du trafic éthiopien, malgré la substantielle rente de sa situation (la France à elle seule verse quelque trente millions d’euros par an en loyer de base et les autres puissances, Etats-Unis en tête, ne sont point avares de millions de dollars), il est très pauvre et classé parmi les Pays les moins avancés (PMA). Avec un PIB de 450 $ par tête d’habitant (évaluation 2000 du PNUD).

Ayant succédé, en 1999, à la faveur d’un hold up électoral, à son proche oncle dont il était le chef de la sécurité, l’ancien policier de l’administration coloniale est président de la République, chef de l’Etat, du gouvernement, de l’administration, du parti au pouvoir, des forces armées, de la sécurité politique et de ses milices… La justice est totalement soumise et l’assemblée nationale, monocolore depuis toujours, une chambre d’enregistrement. Il contrôle les ressources de l’Etat et vicie la vie économique à son profit.

Démocratie, libertés publiques et autres droits de l’Homme ne sont ici que des mots vides de sens dont les violations fondent l’exercice du pouvoir.

Répression de la Presse

Djibouti: Le Témoignage de Daher Ahmed Farah, Novembre 2003.

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