Femmes journalistes en zones de conflit : Changer le récit, rester en sécurité

Dix femmes journalistes ont été tuées dans l'exercice de leurs fonctions en 2022, la plupart d'entre elles se trouvaient dans des zones de conflit. Les femmes journalistes sont confrontées à des défis extrêmes lors de leurs reportages dans des zones de conflit ou de tensions, qu'il s'agisse d'attaques militaires, de menaces, d'intimidations policières, de surveillance ou de violences sexistes. Mais c’est également l'occasion pour elles de proposer un récit différent du conflit. 

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Afin de marquer la Journée internationale des droits des femmes, la Fédération internationale des journalistes (FIJ) et son Conseil pour l'égalité des genres mettent en lumière les femmes journalistes qui couvrent les conflits dans le cadre d'une série d'entretiens visant à pointer leurs défis quotidiens, leurs besoins en matière de sécurité et l'importance pour les gouvernements du monde entier d'approuver les instruments internationaux qui proscrivent la violence et les attaques contre les journalistes.

Qu'elles couvrent des guerres ou des mouvements de protestation, les femmes journalistes travaillant dans des zones de conflit prennent d'immenses risques au nom de la liberté d'informer. La lutte contre la censure étatique, les représailles et la déconstruction de la désinformation sont des défis quotidiens pour beaucoup d'entre elles. 

"Nous pouvons couvrir et diffuser des reportages sur la pauvreté, l'inflation et même les critiques du public à l'égard des questions politiques et des hommes politiques, mais il est extrêmement difficile de réaliser des reportages sur les responsables de ces guerres - dont les politiques sont à l'origine" indique Farzana Ali, chef du bureau d'Aaj News TV à Peshawar, en rappelant que de nombreuses catastrophes humaines ne sont pas racontées par crainte de la répression.

"Les journalistes de Kharkiv (...) ont conclu un accord entre eux pour ne diffuser en aucun cas des informations non vérifiées", indique la journaliste ukrainienne Hanna Chernenko.

La sécurité est une préoccupation majeure pour les femmes reporters et les risques d'enlèvement, de disparition, de violences physiques ou d'emprisonnement font partie de leur quotidien. Dans de nombreuses zones de conflit, le fait d'être journaliste ne garantit pas de ne pas devenir une cible, malgré les conventions internationales existantes, et le manque d'équipement de sécurité adapté au corps des femmes ainsi que l'absence de protocoles de sécurité dans les rédactions exposent les femmes journalistes à des risques encore plus grands.

"L'assassinat de Shireen Abu Akleh a renforcé la peur des journalistes de se rendre sur le terrain. L'assassinat d'une journaliste aussi éminente a rendu le travail des autres encore plus difficile et effrayant, car nous avons réalisé qu'aucun.e d'entre nous n'était en sécurité", explique Areen Amleh, journaliste palestinienne et formatrice de la FIJ en matière de sécurité.

Se renseigner précisément sur la situation sur le terrain, éviter de divulguer sa localisation, identifier des proches à proximité qui peuvent aider en cas de problème, adopter des codes d'urgence avec sa rédaction et élaborer un plan B avant de partir en reportage sont quelques-uns des conseils partagés par les femmes reporters avec la FIJ.

"Mon arrestation a servi d'exemple à mon agence de presse et à mes collègues journalistes pour qu'ils fassent très attention à leur sécurité lors de leurs reportages", résume la journaliste birmane Naw Betty Han.

La précarité dans la profession est un problème récurrent. Dans de nombreuses régions du monde, l'absence de contrat de travail ou d'assurance, les lacunes en matière de sécurité numérique et les arriérés de salaires obligent de nombreu.x.ses journalistes à prendre des risques supplémentaires pour joindre les deux bouts.

Mais les reportages dans les zones de conflits et de tensions sont aussi l'occasion pour les femmes journalistes de proposer un récit différent du conflit, de remettre en question les stéréotypes de genre et de rendre compte de la situation autrement. Parfois, le fait d'être une femme devient même un avantage pour accéder à certains lieux et parler à certaines sources.

"Au Yémen, les femmes peuvent être mieux à même d'accomplir des tâches journalistiques, que ce soit pour couvrir la guerre ou d’autres sujets, étant donné le double impact de la culture et des traditions de la société", résume Thuraya Dammaj, rédactrice en chef du média Yemen Future.

À la veille des célébrations du 8-Mars, la FIJ exhorte les gouvernements du monde entier à lutter contre l'impunité des violences perpétrées à l'encontre des femmes journalistes en ratifiant la Convention n°190 de l'OIT contre la violence et le harcèlement dans le monde du travail et en soutenant la Convention de la FIJ sur la sécurité et l'indépendance des journalistes et des travailleurs des médias

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