Les organisations de journalistes protestent contre les enquêtes américaines sur les médias en Afghanistan

La Fédération Internationale de Journalistes (FIJ) et plusieurs organisations de journalistes ont condamné l'évaluation à laquelle sont soumis les journalistes qui couvrent le conflit en Afghanistan en vue de déterminer leur degré de soutien à l'armée américaine.

Les journalistes et autres professionnels des médias qui cherchent à voyager sous la protection des forces armées des États-Unis pour couvrir  les opérations militaires sont susceptibles de subir une évaluation par une compagnie des relations publiques chargée par le Pentagone de déterminer s'ils font des reportages favorables à l'armée américaine.

«Cette façon d'évaluer le travail des journalistes met en question l'indépendance des médias », a déclaré Aidan White, secrétaire général de la FIJ. « Cela écarte l'idée que l'armée se soucie d'aider les journalistes à travailler librement. Au contraire, cette attitude porte à croire qu'elle est intéressée par la propagande plus que par une information honnête ».

D'après le journal américain Stars and Stripes, les journalistes peuvent être évalués par The Rendon Group, une entreprise notoire de relations publiques. Avant l'invasion de l'Irak, cette même entreprise avait joué un rôle dans la formation du Congrès National Irakien, un groupe d'opposition qui a été accusé par la suite de propager de fausses informations sur les prétendues armes de destruction massive en Irak.

Il y a deux mois, selon le journal, les officiers de l'armée des États-Unis ont refusé d'intégrer son journaliste dans une unité de l'armée américaine en Irak, parce qu'il « refusait » d'accorder beaucoup d'importance aux informations fournies par les commandants américains.

Les organisations affiliées à la FIJ aux États-Unis ont aussi protesté contre cette pratique. Roberta Reardon, présidente de la Fédération Américaine des Artistes de Radio et Télévision, qui compte parmi ses adhérents des journalistes de l'audiovisuel, a déclaré : « Beaucoup d'américains font confiance aux informations indépendantes que les journalistes rapportent pour comprendre ce qui se passe dans le monde et pour former leur propre opinion. Si les militaires devaient donner leur approbation préalable à certains journalistes seulement pour couvrir un aspect ou un projet particulier, nos décisions ne seraient ni indépendantes ni libres, et cela poserait une menace contre notre démocratie. Je suis consternée par cette attaque contre le journalisme de qualité et contre notre liberté ».

Bernie Lunzer, président du TNG-CWA qui représente les journalistes de la presse écrite a également protesté : « Cette pratique ébranle notre principe de base de ne publier que la vérité en toute objectivité et sans censure gouvernementale. Travailler au sein d'une unité de l'armée pose toujours des problèmes, mais cette fois nous dépassons les bornes ».

La FIJ indique que la fusion récente des services chargés des relations publiques des Etats-Unis et de l'Otan à Kaboul  a créé une seule source d'information pour les médias et pour les demandes des journalistes souhaitant une intégration dans des unités de combats. Cela a également renforcé l'influence du groupe Rendon. D'après plusieurs sources officielles, il y a environ 60 médias étrangers en Afghanistan qui travaillent sur le terrain aux côtés des unités de l'armée américaines et des forces de l'Otan.

« L'avènement de la démocratie en Afghanistan est un défi énorme », a conclu White, «mais il ne deviendra pas plus facile si l'on essaie de manipuler les médias ou si l'on encourage un journalisme tendancieux en faveur des militaires ».

Pour plus d'information, veuillez appeler la FIJ au             +32 2 235 2207       

La FIJ représente environ 600.000 journalistes dans 123 pays du monde